22 Mar 2018
Moqrisset, Maroc
Tourisme durable

Dans le nord du Maroc, il existe une région montagneuse appelée Moqrisset. Sa beauté naturelle est vierge et la verdure tisse une tapisserie sur les collines. Des étendues bleu azur sont flanquées de gros rochers, et une brume flotte sur les vallées. La région abrite 44 tribus et 10000 habitants, des gens qui sont pratiquement coupés du monde extérieur et qui dépendent de l’agriculture pour gagner leur vie. Ils récoltent du miel, cultivent des figues, des prunes et des olives ; ils produisent de l’huile d’olive et cueillent des herbes aromatiques, luttant contre la pauvreté et le chômage.

À Moqrisset, vous trouverez également une auberge qui ressemble moins à un hôtel qu’à une habitation de hobbit. Construite avec des matériaux naturels comme la pierre, le bois, la paille et le chanvre, l’auberge se fond dans le paysage. Ses meubles ont été fabriqués par des bénévoles à l’aide de matériaux recyclés tels que des palettes de bois et des roues.

Cette auberge se nomme le Djebli Club, et c’est un endroit où l’ancien monde rencontre le nouveau, où c’est la connaissance qui est partagée au lieu de l’argent, et où une nouvelle forme de tourisme durable est née.

Comment le Djebli Club a vu le jour :

Allae Hammioui, fondateur du Djebli Club, est né et a grandi à Berkane, au Maroc, où il a vécu jusqu’à l’âge de sept ans, quand sa famille a déménagé à Salé. Il a fait ses études à l’école de formation professionnelle IFIAG, où il a étudié l’administration des ordinateurs et des réseaux. Il a travaillé à l’école pendant un certain temps, mais il a fini par changer de carrière.

« J’ai changé de métier à plusieurs reprises à cause d’une idée qui a toujours hanté mon esprit », dit celui-ci. « J’ai été directeur de formation, directeur commercial et consultant. J’essayais de trouver ma propre voie ». À la recherche de sa vocation, il s’installe en France, mais n’y trouve pas plus son rythme. Finalement, il rentre au Maroc.

« Je ne pense pas que nous existions uniquement pour manger, dormir et accomplir des tâches basiques », explique-t-il. « Nous sommes tous sur cette terre parce que nous avons chacun notre propre mission. J’ai pensé que peut-être, ma mission consistait à aider les gens et à tenter de changer leur vie. J’ai voulu apprendre aux gens comment trouver  leur propre voie ».

Allae Hammioui savait qu’il voulait être plus proche de la nature et de la terre, encourager les gens à voyager et apporter un soutien économique à une région en difficulté.

Combinant tous ces sujets qui le passionnent, il fonde le Djebli Club, une petite auberge qui accueille des voyageurs venant du monde entier. Les visiteurs ne sont pas à la recherche du luxe, ils viennent à l’auberge pour réellement comprendre la communauté. En échange de leur séjour, ils enseignent.

« Chaque résident du Djebli Club est tenu de consacrer deux ou trois heures par jour à des ateliers ou à des formations pour la communauté locale. Ces formations sont choisies selon les domaines d’expertise de chaque voyageur. C’est une forme de tourisme collaboratif, où les gens payent en savoir-faire plutôt qu’en cash ».

« Si vous êtes bon en marketing, vous enseignez cela. Si vous vous y connaissez en architecture, vous faites un cours sur le sujet. Cela dépend vraiment de la personne », ajoute Allae Hammioui. « Ensuite, les habitants de la région acquièrent ces connaissances de sorte à ne pas  être condamnés au chômage ».

L’impact du Djebli Club sur la communauté :

Fondé en 2015, le Djebli Club a déjà commencé à transformer des vies. Depuis son ouverture, 800 visiteurs de 18 pays l’ont fréquenté pour y séjourner, apprendre et enseigner. Ces visiteurs ont animé 150 ateliers.

« Ceci a  un impact direct sur les habitants de la région », explique Allae Hammioui. « Au début de l’année scolaire [l’organisation] a distribué des cartables avec des livres dont les élèves ont besoin. Certains parmi les meilleurs éléments ont reçu des bourses d’études. L’un d’entre eux est aujourd’hui étudiant en ingénierie aérospatiale ».

Le Djebli Club encadre également des projets en cours, notamment des ateliers pour les enfants autour de thèmes comme le respect de la planète, la citoyenneté et les droits de l’homme. Il y a un jour consacré au théâtre et une étude a été lancée sur le développement de Moqrisset.

Karim El Hamri est le fondateur d’une ONG nommée Ta7rir, qui a comme objectif de résoudre les problèmes sociaux par l’art et la créativité. Il a séjourné au Djebli Club et a affirmé que c’était une expérience merveilleuse, offrant un espace de travail paisible et respectueux de l’environnement.

«  J’en suis devenu dépendant et je suis resté une semaine, pour rencontrer des gens et voir ce qu’ils font là-bas », dit-il. « Nous avons eu l’occasion d’organiser une session de graffitis pour les locaux ; et c’était une expérience incroyable ».

 

Karim El Hamri ajoute que le Djebli Club cible les citoyens locaux en proposant des alternatives pour l’éducation et les compétences non techniques, et en promouvant la mobilité et les échanges afin d’apporter plus de talents et d’opportunités dans la région.

« Le Djebli Club vise à montrer un modèle qui associe l’esprit d’entreprise, le travail social et le travail écologique », dit-il. « Le projet promeut l’ouverture et l’échange culturel, qui sont uniques au Maroc et qui doivent être encouragés ».

Allae Hammioui espère également que cette initiative contribue à prôner l’humanité, le retour aux sources, le respect de la nature et le partage, en tant que parties intégrantes du vivre ensemble.

« Mon désir le plus cher est que ce projet  devienne un éco-village en mesure d’améliorer la vie des gens », dit-il. « Pour l’instant, nous avons quatre chambres, mais à l’avenir, j’espère en avoir 20 ou plus. Certaines chambres seraient destinées aux personnes qui voudraient rester et vivre ici, et non pas juste visiter ».

Le projet fonctionne actuellement grâce au seul financement participatif. A l’avenir, Allae Hammioui espère diversifier son financement en ouvrant une boutique pour mettre en valeur l’art et l’artisanat locaux.

« Le secret des voyages, c’est qu’ils vous donnent le temps d’observer, d’entendre, de rencontrer et de découvrir qui vous êtes vraiment. Voir l’humanité en chacun d’entre nous », dit celui-ci. « Voyager m’a fait me retrouver dans la nature – une partie de moi qui appartient à la terre et qui a besoin d’y retourner. En général, nous oublions que nous faisons partie de la planète et que nous n’existerions pas sans elle ».

 

Pour en savoir plus sur le Club Djebli, consultez sa Page Facebook.

Photos : Avec la permission du Djebli Club et de Lotfi Souidi

Kristin Hanes est une journaliste passionnée par l'environnement, la durabilité et la science. Elle adore raconter les histoires des gens qui font une réelle différence dans le monde.Kristin Hanes
Une initiative originale de tourisme durable au Maroc où les voyageurs payent avec leur savoir | The Switchers
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