02 Oct 2018
Casablanca, Maroc
Efficacité des ressources et gestion durable des déchets

Valenvi, une jeune entreprise de recyclage basée à Casablanca, allie un rêve de lycée à l’infinie ingéniosité des ramasseurs de déchets du Maroc. El Mehdi Habib, fondateur et PDG de Valenvi, emploie ces ramasseurs informels de déchets qui passent les décharges au peigne fin pour y récupérer les matériaux recyclables. Valenvi produit également des poubelles de tri qui montrent aux citoyens ordinaires comment trier les ordures plus efficacement.

Valenvi stimule le changement social, non seulement en renforçant les références écologiques du Maroc, mais aussi en responsabilisant les ramasseurs d’ordures locaux, dont beaucoup ont des opportunités limitées en matière d’éducation et d’emploi. Cependant, El Mehdi voit la valeur intrinsèque du travail des éboueurs pour le Maroc, un pays qui ferait bien d’adopter avec plus d’enthousiasme le recyclage à petite échelle.

En 2009, un défi d’entrepreneuriat au lycée avait semé les graines à l’origine de la création de Valenvi, une startup marocaine de gestion des déchets axée sur le recyclage à petite échelle. El Mehdi, alors adolescent enthousiaste, avait proposé une entreprise qui aiderait les Marocains à recycler le papier plus efficacement.

En partant de ce début idéaliste, El Mehdi s’est appuyé sur sa double passion pour la gestion durable des déchets et pour l’innovation commerciale. « Je voulais combiner l’esprit d’entreprise et l’environnement », raconte-t-il. Depuis 2016, Valenvi fabrique des bacs de tri et organise pour certains clients la collecte des déchets recyclables.

Valenvi vise à améliorer le recyclage à petite échelle au Maroc en employant les « ramasseurs d’ordures » informels qui fouillent les décharges pour trouver des matériaux recyclables. La Banque mondiale reconnaît le rôle important, souvent invisible, des ramasseurs de déchets dans les économies en développement, qui génèrent de petits profits en donnant une seconde vie aux déchets. Le Maroc dispose d’un grand nombre de ces recycleurs pragmatiques, avec 600 ramasseurs d’ordures illégaux, opérant rien que sur la décharge de Mediouna, en dehors de Casablanca. Pourtant, les éboueurs souffrent de la stigmatisation sociale qui entoure leur travail et subissent parfois le harcèlement de la police.

Valenvi responsabilise les éboueurs marocains en leur offrant des conditions de travail plus sûres et de meilleures perspectives d’emploi pour l’avenir. En même temps, les citoyens apprennent à mieux répartir les déchets grâce aux poubelles de tri de Valenvi, ce qui facilite le processus global de recyclage au Maroc. El Mehdi fait toujours face aux défis typiques d’une entreprise en démarrage – rentabilité et espace de stockage – tout en s’efforçant de sensibiliser le public au recyclage à petite échelle.

Le pouvoir du micro-recyclage :

La marque d’entreprenariat environnemental d’El Mehdi a pris forme alors qu’il travaillait dans une banque de Casablanca, quelques années après avoir terminé son projet d’études. La banque avait généré une énorme quantité de papier mis au rebut, mais ne disposait pas d’un système fonctionnel de gestion des déchets pour ce papier. « Je me suis demandé ce que je pouvais faire pour résoudre ce problème », raconte-t-il.

Valenvi répond à cette préoccupation avec sa double offre de production de bacs de tri et d’enlèvement des déchets pour ses clients. Au début, les collectes ne s’appliquaient qu’au papier mis au rebut, mais l’entreprise traite aujourd’hui des déchets plus divers. Valenvi vend les matériaux récupérés à des usines de recyclage professionnelles.

Valenvi s’appuie sur les ramasseurs d’ordures locaux comme autre source de déchets recyclables et emploie quatre ramasseurs à temps partiel. El Mehdi prévoit de lancer un réseau de collecte encore plus large avec Trivalo, une initiative planifiée qui vise à ramasser gratuitement les ordures ménagères. Trivalo lancera le programme une fois que Valenvi aura surmonté les coûts de transport et qu’elle sera financièrement viable.

El Mehdi Habib parle avec fierté de « l’impact social » de Valenvi en facilitant le travail des éboueurs marocains. Valenvi s’assure que ses collecteurs sont vêtus de vêtements de protection et équipés d’outils appropriés, leur permettant ainsi de gagner leur vie dans un environnement sûr.

Selon El Mehdi, la politique de recrutement de Valenvi accorde la priorité aux personnes connaissant des circonstances difficiles – dont beaucoup ont une éducation très limitée – et offre des possibilités autres que la récupération des matières recyclables. « Nous essayons de leur trouver un meilleur emploi en leur enseignant des compétences clés, afin qu’ils puissent avoir un emploi [permanent] et travailler d’une manière plus durable », explique-t-il. Les anciens employés de Valenvi ont réussi à trouver un emploi stable dans les restaurants et les universités.

« De cette façon, nos travailleurs quittent Valenvi avec plus de connaissances et de reconnaissance [sociale] », explique El Mehdi.

Obtenir plus d’adhésion :

De nombreux créateurs d’entreprises en phase de démarrage pourraient s’identifier aux défis les plus immédiats de Valenvi. L’entreprise n’est pas encore rentable, une situation qu’El Mehdi espère voir changer si Valenvi peut acheter des équipements tels qu’un compacteur à ordures et un véhicule de collecte. Ces ajouts permettraient à l’entreprise de traiter plus de déchets et d’accroître sont efficacité en matière de stockage.

Le manque d’espace est un problème urgent pour Valenvi, qui dispose d’un espace limité pour gérer une entreprise encombrante. L’entreprise stocke les déchets collectés et fabrique des bacs de recyclage dans la même installation, ce qui rend l’espace de travail très étroit. El Mehdi espère négocier un contrat de stockage avec un grand client industriel qui profitera aux deux parties.

Au-delà de ces questions spécifiques, Habib rapporte que Valenvi doit faire davantage pour changer les attitudes qui prévalent à l’égard du recyclage à petite échelle au Maroc. Les poubelles de tri de l’entreprise ne sont efficaces que si elles sont utilisées correctement, et les employés de Habib constatent encore que les gens ne trient pas correctement les différents types de déchets. « Ce comportement nous empêche d’obtenir un score de 100% en termes de recyclage », déplore-t-il.

La même critique s’applique à de nombreuses entreprises marocaines qui, selon Habib, ne prennent pas le recyclage aussi au sérieux que les entreprises étrangères. Tous les clients actuels de Valenvi sont des multinationales comme la chaîne hôtelière Four Seasons et le fabricant d’escaliers mécaniques Schindler, qui, selon Habib, sont « tout simplement plus conscients de l’importance du recyclage ». Ces grandes entreprises ont tendance à suivre les pratiques mondiales de l’industrie en matière de durabilité, alors que les entreprises locales ne respectent pas les mêmes normes.

Pourtant, l’histoire de Valenvi montre que le Maroc a déjà les germes d’une révolution du micro-recyclage : l’éthique même de l’entreprise repose sur le rêve d’un adolescent et le regard affuté des ramasseurs d’ordures locaux. Aujourd’hui, Habib veut qu’un plus grand nombre de ses compatriotes se joignent au défi. « Nous montrons aux Marocains pourquoi ils doivent faire un petit effort : parce qu’ils peuvent sauver le monde ».

 

Pour en savoir plus sur Valenvi, visitez son site Web.

Photos : Avec la permission de Valenvi

Depuis qu'il a obtenu sa maîtrise en études du Moyen-Orient l'année dernière, il travaille comme journaliste pigiste à Accra au Ghana et au Caire en Égypte.David Wood
Un trésor dans la poubelle : un nouveau souffle pour le recyclage à petite échelle au Maroc | The Switchers
Traduction : Lilia Bacha
Valenvi Efficacité des Ressources & Gestion durable des déchets