03 Juil 2018
Beyrouth, Liban
Efficacité des ressources et gestion durable des déchets

Comme beaucoup de gens, Jana Saleh et Gaston Valenzuela n’en peuvent plus des montagnes de déchets au Liban. Ils décident alors de créer leur propre entreprise éthique en recyclant des matériaux pour inverser la tendance négative de l’impact écologique infligé par l’industrie de la mode. En suivant ce principe, le couple provoque un changement grâce à sa jeune entreprise, Lama Yulu.

« Les gens tiennent à avoir une belle apparence, alors nous avons pensé à  répondre à ce besoin sans pour autant participer du consumérisme de masse, et ce en créant des produits recyclés qui sont à la mode, tout en étant durables », dit Jana, qui est cofondatrice de l’entreprise avec Gaston, son partenaire.

Pour accompagner l’idée, le couple lance un blog donnant des informations sur les déchets et montrant la mesure dans laquelle nous polluons la terre et la mer. « Nous avons commencé à sensibiliser les gens et à créer des ateliers éducatifs », dit Jana.

Les débuts de Lama Yulu :

Le modeste lancement de Lama Yulu commence par quelques foires commerciales et se termine avec une boutique en ligne en 2017, vendant des produits à travers tout le Liban. « Nous avançons lentement mais sûrement, avec une collection diversifiée », explique Jana. Également prof de yoga, celle-ci ajoute qu’elle et son mari travaillent actuellement depuis leur domicile.

Parmi les avalanches de déchets qui se déversent sur les côtes libanaises, les pneus sont les plus courants et les plus dangereux parce qu’on a tendance à les brûler. Les effets sur la santé se font ressentir à court et à long terme, et ceux-ci dépendent fortement du degré d’exposition, pouvant varier de problèmes respiratoires au cancer.

Justement, le matériau précisément utilisé par Lama Yulu provient de la chambre à air des pneus. « Les pneus sont généralement jetés à la mer ou brûlés dans les rues », explique Jana. « Nous avons donc réutilisé les chambres à air ; nous les récupérons, les lavons, les nettoyons et les transformons dans notre atelier. Certaines [quantités] d’entre elles sont découpées au laser, nous devons dans ce cas les expédier à nos fabricants, finissant ainsi par aider les travailleurs libanais ».

Non seulement Jana et Gaston travaillent indépendamment sur le développement de leurs seuls produits, mais ils s’occupent également de l’emballage et de la marque Lama Yulu. « Jusqu’à présent, nous avons principalement utilisé des chambres à air, mais nous prévoyons de fabriquer des bracelets et des accessoires à partir de sacs en plastique et de nous lancer dans l’industrie du recyclage des bouteilles en plastique ».

Gardant un tel credo à l’esprit, Jana et son mari rêvent d’« empreintes carbone ‘lavables’ pour cette planète ». Leur équipe composée de deux personnes s’occupe de tout : la fabrication, la conception, l’emballage et la présentation finale.

« Nous faisons appel à des professionnels si nous avons besoin de matériaux à découper au laser, mais ils ne travaillent avec nous qu’en cas de besoin », précise Jana.

Comment financer une entreprise ?

Quand Lama Yulu a commencé, le couple utilisait uniquement ses sources de revenus personnelles, entre les cours de yoga de Jana et les événements que le couple organisait. « L’investissement initial a été fait par nous, et à partir de là, nous avons pu créer la première collection qui a été vendue, apportant des revenus pour fabriquer plus d’accessoires, pour ensuite nous vendre et nous financer pour devenir quelque chose de plus grand », ajoute Jana.

Bien qu’ils suivent la voie de l’autofinancement, Jana et Gaston ne sont pas entièrement opposés à l’idée d’un partenariat avec les parties prenantes. « Il faudrait que la personne en question partage les mêmes valeurs que celles d’une entreprise éthique », dit Jana. « De toute évidence, personne ne refuse de faire de l’argent, mais nous ne voulons pas faire de l’argent au détriment de nos valeurs », ajoute-t-elle, affirmant qu’elle et son mari préfèrent avancer lentement plutôt que de compromettre leurs principes, et qu’ils souhaitent apporter de nouveaux moyens de mise en œuvre pour grandir d’une manière éthique.

Tout comme le soutien financier de l’entreprise, il y a l’aspect social qui contribue à perpétuer l’objectif de Lama Yulu. « Nous sommes ce que nous sommes par méconnaissance ; nous venons d’un pays en guerre, donc la survie est notre objectif principal », explique Jana.

L’article de mode de Janna est aussi une déclaration en faveur de l’environnement. « Nous devons faire plus pour la sensibilisation sociale, par le biais du contenu Web et des médias sociaux », dit-elle. Celle-ci pense que l’on dispose de son libre arbitre et de sa propre option pour choisir des produits qui profitent à l’environnement.

Mélanie Achdjian, étudiante de yoga de Jana et cliente de longue date, partage le même sentiment. « Qui peut contester l’intérêt de transformer des chambres à air usagées [de pneus] en pièces d’art vestimentaire ? Je leur ai acheté cinq bijoux. Certains ont été donnés en cadeau. Tous ceux qui ont vu les articles les ont aimés », dit-elle.

Mélanie Achdjian a également exprimé son admiration pour l’engagement de Lama Yulu en faveur de la durabilité et de la diffusion de changements positifs en tant que marque. « Jana et Gaston font plus que simplement parler de faire un changement : ils y mettent de l’énergie, s’engagent à faire ce changement, réduisent et recyclent les déchets existants et sensibilisent davantage le public à la nécessité de repenser nos habitudes de consommation existantes », ajoute-t-elle. « Depuis le bois récupéré utilisé dans l’atelier de Lama Yulu jusqu’aux bijoux, aux cours de yoga de rajeunissement et aux voyages d’escalade, ils mènent des programmes de sensibilisation pour la durabilité et pour les perspectives positives. Ils sont une source d’inspiration pour nous tous ».

A partir d’une tonne de granulés de caoutchouc extraits directement de tubes intérieurs, Lama Yulu a fabriqué un millier de pièces. « Nous travaillons sur d’autres projets et en août, nous participerons à l’exposition annuelle de MZA’ART SOUS LA TENTE », ajoute Jana.

 

 

 

 

Pour en savoir plus sur Lama Yulu, visitez son site Web, ou consultez sa page Facebook et Instagram.

Photos : Avec la permission de Lama Yulu.

Eman est la rédactrice en chef des Switchers et journaliste spécialisée dans la finance et dans les startups orientées écosystème.Eman El-Sherbiny
Des entrepreneurs libanais créent de beaux accessoires à partir de pneus usagés | The Switchers
Traduction : Lilia Bacha
Lama Yulu Efficacité des ressources & Gestion durable des déchets