25 Fév 2018
Rabat, Maroc
Tourisme durable

Les villes ont toujours été construites autour des cours d’eau pour de bonnes raisons : ces derniers formaient des artères de circulation, servaient de routes commerciales, étaient une source de nourriture et permettaient de s’évader dans la nature. Une entreprise sociale basée à Rabat au Maroc, Barqu’ade, partage cet héritage avec les touristes et la population locale, tout en posant solidement un pied dans l’avenir.

Tout comme l’exploration d’une ville à pied offre des moments d’arrêt et de contemplation, les bateaux sont un moyen de dériver et de découvrir les choses paisiblement. Voyager sur l’eau est la méthode privilégiée par Barqu’ade, qui organise des excursions en bateau commentées en anglais, français et arabe. Les petits bateaux en bois flouka (felouque) utilisés par l’entreprise sont autant respectueux de l’environnement que possible et avancent à l’aide de rames plutôt qu’avec un moteur.

Chaque circuit offre la possibilité de découvrir la riche histoire et la biodiversité du fleuve Bouregreg, de la vallée et des villes qui bordent ses rives, Rabat et Salé.

Les origines du Barqu’ade :

Pour la cofondatrice du Barqu’ade, Oumel Ghit Guelzim, le fleuve Bouregreg est plus qu’un endroit où son entreprise est basée : c’est un lieu qui abrite un souvenir d’enfance. « Mon père m’emmenait faire de petites promenades en bateau dans la vallée du Bouregreg », se souvient-elle. « C’est l’un de mes rares souvenirs avec lui, et c’était notre moment à nous. Lorsque on a décidé de travailler avec les communautés de la vallée, j’étais parmi les premiers à être enthousiaste à l’idée ».

L’idée, quant à elle, a vu le jour en 2014 lorsque Oumel Ghit Guelzim était étudiante en ingénierie à l’Institut National des postes et télécommunications. Elle avait alors participé à un programme Enactus, et l’un des projets consistait à créer une initiative qui se traduirait par une communauté active.

En parlant à des timoniers locaux (conducteurs de bateaux), Oumel Ghit Guelzim et son équipe découvrent que leur activité économique se limitait à des traversées de rivière de Rabat à Salé – bien loin de l’époque où la navigation de plaisance était l’activité la plus connue à Rabat. « Personne ne s’intéressait à notre activité, et nous étions sur le point de l’arrêter », dit Mohamed El Haimer, Président de l’Association des Flaykias du fleuve Bouregreg à Rabat (qui représente les conducteurs des bateaux locaux).

Se souvenant des matins calmes sur le fleuve avec son père, Oumel Ghit Guelzim réalise que l’histoire et la beauté de la vallée valaient la peine d’être partagées. Peu de temps après, elle et son équipe lancent Barqu’ade, avec pour mission de relancer les activités nautiques et de transformer la vallée du Bouregreg en pôle touristique.

Il y a actuellement 72 conducteurs de bateaux employés par l’entreprise. En l’absence de clients, ceux-ci sont libres de travailler de manière indépendante et de continuer à faire leurs traversées quotidiennes entre Rabat et Salé.

« Grâce à l’équipe de Barqu’ade, nous avons mis en place beaucoup de nouveaux services, et nous avons beaucoup de touristes comme clients », ajoute Mohamed El Haimer. « Nous pensons que notre vie va beaucoup s’améliorer grâce à Barqu’ade ».

Un nouveau concept pour le Maroc :

Bien que les promenades en bateau soient une attraction commune dans les villes du monde entier, l’activité reste relativement rare au Maroc et dans toute la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. « Nous pensons que c’est un bon moyen de promouvoir le patrimoine marocain tout en créant des opportunités d’emploi pour les capitaines de bateaux », affirme Oumel Ghit Guelzim.

La plus longue excursion en bateau du Barqu’ade est la Bouregreg Story, où les touristes découvrent un siècle d’histoire de la vallée. Pendant le Ramadan, le Barqu’ade propose également des promenades spéciales pour les dîners iftar où les gens peuvent rompre le jeûne après le coucher du soleil sur le fleuve. Oumel Ghit Guelzim est loin d’être à court d’idées et aimerait lancer des dîners romantiques, des activités autour de l’esprit d’équipe et des activités pour les enfants, tout en dérivant sur le fleuve.

Depuis quatre ans, la demande de promenades en bateau ne cesse de croître. Le Barqu’ade a vu défiler 500 clients par an au cours des dernières années ; et pour 2018, selon Oumel Ghit Guelzim, 1000 visiteurs sont attendus.

Le développement dans la vallée du Bouregreg :

Il arrive que le Barqu’ade soit au bon endroit au bon moment.

La vallée du Bouregreg est un point névralgique pour l’expansion économique et c’est la deuxième zone urbaine la plus importante du pays. Bientôt en 2018, la mise en œuvre d’un projet de développement de la vallée du Bouregreg est prévue ; l’initiative est soutenue par l’Union pour la Méditerranée et gérée par un organisme public. Ce projet permettra de réhabiliter les berges du fleuve Bouregreg, de créer des sites naturels et de promouvoir une croissance durable à Rabat et à Salé.

Le développement durable est également l’un des principaux objectifs du Barqu’ade – où l’on refuse de prospérer au prix d’un compromis avec la nature. « Nous voulons avoir une grande activité touristique en mesure de faire croître l’économie, mais nous ne voulons pas détruire l’environnement en le faisant », dit Oumel Ghit Guelzim à propos de son entreprise. « À chaque maillon de notre chaîne de valeurs, nous nous assurons que la nature est respectée ».

Une navigation de plaisance avec un peu d’éducation autour de l’environnement :

Ce respect de la nature est un principe que le Barqu’ade souhaite mettre en valeur auprès de ses clients et de ses conducteurs.

Lorsque de la nourriture et des boissons sont servies lors des excursions, on s’assure au Barqu’ade que tous les emballages sont recyclables et qu’ils ne sont pas jetés dans la rivière. On s’efforce également de sensibiliser les conducteurs à l’importance de préserver l’environnement naturel de leur lieu de travail. Selon Oumel Ghit Guelzim, cela n’a pas toujours été aussi simple.

« La première année, les conducteurs de bateaux n’avaient pas cette mentalité écologiste », explique-t-elle. Ils jetaient tout dans la rivière. En travaillant avec eux, nous nous assurons qu’ils respectent notre stratégie et nous les sensibilisons chaque semaine à l’importance de respecter l’environnement et à nos valeurs en tant qu’entreprise sociale ». En retour, les conducteurs ont également leur mot à dire dans le processus de conception des nouvelles promenades en bateau et des nouveaux services proposés aux visiteurs.

Une fois le Barqu’ade mieux installé dans la vallée du Bouregreg, Oumel Ghit Guelzim espère que l’entreprise sociale pourra étendre ses activités à d’autres régions du pays, ajoutant qu’il y a beaucoup de villes au bord de l’eau où les touristes font des visites prolongées, y compris la ville portuaire atlantique d’Essaouira.

Là où il y a une rivière ou de l’eau, il y a un chemin.

 

Pour en savoir plus sur le Barqu’ade retrouvez-la sur sa page Facebook ou sur Instagram.

Images: Courtesy of Barqu’ade.

Hilary est journaliste, photographe et créatrice. Elle adore travailler avec les entrepreneurs pour partager leurs histoires et elle le fait partout dans le monde.Hilary Duff
Une escapade historique à la pointe de l’écologie dans la vallée du Bouregreg au Maroc | The Switchers
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